Carte Méditerranée 11ème sc |
Atlantico : Trois hommes, connus des services de police ont été tués ce mardi sur une petite route de Haute-Corse. Les enquêteurs privilégient la piste du règlement de compte. Ces meurtres viennent grossir les chiffres de la criminalité liée au grand banditisme corse. Ce regain d'activité amène à s'interroger sur la place de l’État dans cette zone. A-t-on en Corse un schéma identique à celui de la Sicile c'est-à-dire un grand banditisme qui prospère grâce à un no men's land étatique ?
Fabrice Rizzoli : Je ne fais pas partie de ceux qui dénoncent l'absence de l'Etat de droit en Corse, car selon moi il existe bel et bien, mais pâtit de failles importantes. Ces dernières sont d'autant plus visibles que la violence en Corse est bien plus prégnante que dans les autres départements français : 30 meurtres et tentatives de meurtres par an pour 300 000 habitants. C'est bel et bien le taux de criminalité le plus élevé de l'OCDE et des régions d'Europe. C'est plus qu'à Naples ou en Sicile. Malgré ces chiffres alarmants et quasi récurrents ces dix ou quinze dernières années, des solutions tardent à être trouvées pour endiguer ce phénomène. Cela conduit à une certaine impunité des bandits, quels qu'ils soient. Sur ces trente meurtres, combien ont été résolus par les services de police ? Combien de bandits ont été mis en prison ? L'Etat de droit en pâtit, s'affaiblit et devient défaillant.
Peut-on comparer la Corse et la Sicile, qui a aussi souffert de la défaillance de l'Etat de droit ?
Les chiffres de la criminalité que l'on a en Corse aujourd'hui sont similaires à ceux que l'on constatait en Sicile au début des années 80, où Il y a eu parfois jusqu'à 300 à 400 meurtres par an, sur une population de 5 millions d'habitants. Si l'on veut comparer correctement la Corse et la Sicile, il ne faut pas oublier que cette dernière a bien plus d'autonomie. Si la Sicile a réussi a faire baisser cette violence, c'est uniquement par la mise en place d'une magistrature indépendante qui s'est attaqué de façon frontale à la mafia, en confisquant ses avoirs puis qui a bénéficié d'une loi lui permettant de réutiliser les biens confisqués. On a aussi mis en place le système des collaborateurs de justice que les journalistes ont surnommés "les repentis". Tout ce dispositif a réduit les marges d'action des mafias siciliennes et les a poussés à se concentrer sur leurs business et à ralentir les assassinats. Lire la suite...
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